Nord -Marc

Le polonais tombé du ciel !

J’étais en 1974 journaliste à l’agence de Nord Matin à Boulogne sur Mer, qui, comme chacun sait est, où était du moins, le premier port de pêche de France avec environ 150000 tonnes de poissons pêchés par an.

Un jour, ma direction  me propose de participer à un voyage de presse en Pologne avec possibilité de visiter les chantiers navals de Gdansk, ancienne Dantzig, grand port sur la mer Baltique.

Sachant qu’une partie des chalutiers industriels boulonnais étaient construits là-bas, que dans des postes précédents dans les mines du Pas de Calais, j’avais côtoyé nombre de français d’origine polonaise qui m’avaient tant parlé de leur pays natal, j’acceptais de participer à ce voyage avec enthousiasme.

Le programme comportait quatre jours à Varsovie. Dans la capitale, nos hôtes furent soucieux de nous présenter l’économie de leur pays, son histoire, sa politique…Puis notre groupe de cinq journalistes se scindaient : trois d’entre nous partirent dans la région de Cracovie, quant à moi et un autre compagnon de voyage nous prîmes la direction de Gdansk, située à 300    kilomètres au nord.

Il nous fallut quelques heures de train, en partie la nuit, pour arriver à destination, avec un retard conséquent, bien après minuit.

De fait, il restait bien peu de monde à descendre du convoi, terminus du voyage, si bien que dans le hall de l’immense gare nous ne tardâmes pas à ne rester que deux. L’hôtesse qui devait nous réceptionner n’étant pas au rendez-vous !

Je vous déconseille la gare de Gdansk à une heure du matin, un soir de Mars. Il y fait froid, c’est, comme toutes les gares, inconfortable et l’on s’y ennuie, car tout est fermé.

Il n’était pas question pour nous de passer la nuit dans ce sinistre endroit. Après quelques minutes sans croiser âmes qui vivent, nous sortîmes du bâtiment. La place de la gare était aussi déserte que le hall, et nous avions un problème sérieux : nous ignorions le nom de notre hôtel !

Par chance, un grand hôtel dont l’entrée était éclairée se situait de l’autre côté du terre plain.

Le réceptionniste était le seul occupant des lieux, une salle des pas perdus et un comptoir d’accueil, quelques fauteuils confortables…Je me suis alors dit que la grande ville de Gdansk était bien peu animée à cette heure encore convenable, mais, au moins pourrions-nous peut être passer la nuit là.

Mais un nouveau problème survînt : le veilleur de nuit ne parlait que le polonais, pas nous ! Il ne connaissait ni l’anglais, ni l’allemand. A force d’échanges laborieux, nous nous rendîmes à l’évidence, l’hôtel était complet.

Soudain, une voix salvatrice nous parvint du centre du hall qui s’exprimait en français, «puis je vous aider ? ».

Elle émanait d’un homme vêtu d’un bleu de travail, grand, la cinquantaine, celui de la providence. Il nous servit d’interprète en à peine une minute, le temps d’apprendre que nous étions dans le bon hôtel, des chambres étant réservées à nos deux noms, enfin que notre hôtesse allait venir. Notre retard l’avait découragée.

Je n’ai hélas pas pu remercier notre interprète. Il avait disparu aussi vite qu’il était apparu !

Tout juste avait-il eu le temps de nous dire qu’après la guerre, il avait  immigré en France. Il préféra finalement rejoindre son pays natal quelques mois plus tard. Le plus extraordinaire est qu’il avait été mineur à Bruay en Artois, là où j’avais moi-même habité.

Je ne saurai jamais qui était cet homme venu de la nuit profonde nous tirer d’affaire, tout juste qu’il était devenu routier international, et à l’image de tous les polonais, un exemple d’hospitalité et de savoir-vivre.

 

 



13/01/2011
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